Prédication de Jean-Pierre Julian le 7 septembre 22025

Prédication de Jean-Pierre Julian

Luc 14 v 25 à 35 : Accueillir et vivre de la Vie du Crucifié/ Ressuscité des morts

Frères et sœurs en Christ. Jésus, notre Seigneur, serait-il contre la famille, contre le couple, contre la fratrie, la sororité, contre la vie elle-même et contre la possession de toutes sorte de biens ? Pourquoi cette parole si abrupte, si provocante encore aujourd’hui ?

1 Réfléchis avant de t’engager, réfléchis encore lorsque tu es engagé !

Jésus, sent bien que la foule qui le suit, elle le suit sans comprendre les véritables enjeux qui concernent Sa personne : qui est-Il vraiment ? Pourquoi est-Il venue ? Quel est le sens de Sa vie ? Les gens le suivent, certes, mais sans comprendre qui Il est vraiment et pourquoi Il dit toutes ces paroles. Certes, il fait des miracles. Certes, il cloue le bec aux religieux, aux hommes de pouvoir. Certes, mais au-delà de ça : Qui est-Il vraiment ? que cherche-t-Il à transmettre ? Alors Jésus se retourne et ose cette parole sans concession. Son seul but ici est de provoquer une réflexion individuelle et profonde. Il s’adresse donc à la foule qui le suit pour que celle-ci ne soit plus une foule bêlante d’admiration. Il s’adresse non pas à la foule mais à chaque personne, chaque individu qui le suit. Chacune et chacun, doit maintenant prendre le temps d’une halte et de réfléchir. Il est à noter que certaines Eglises chrétiennes tombent parfois dans le piège d’une lecture trop littéraliste de ce passage de Luc. Elles encouragent même la séparation des couples, et des familles si l’un d’entre eux refuse d’entrer dans le rang, c’est-à-dire de devenir semblable au groupe, d’avoir une pensée commune, identique et ainsi abandonnée toute réflexion individuelle, personnelle. Première bonne nouvelle pour nous aujourd’hui, Jésus, notre Seigneur, ne cherche pas à être suivi par une immense foule sans tête mais il appelle chaque individu qui le suit à réfléchir. Réfléchir c’est prendre conscience que nous sommes des êtres humains libres et responsables devant Dieu. Mais, réfléchir à quoi ? A Lui. A Jésus : Qui est-il ? Pourquoi est-il là ? Pourquoi parle-t-il en parabole ? Quel sens donne-t-il- à Sa propre vie ? Suivre le Christ Jésus, c’est bien, mais pourquoi je le suis, Lui. Qu’a-t-il de plus que les autres ? Pourquoi sa Parole m’interpelle-t-elle ? Contentons-nous, pour le moment, de retenir cet appel à la réflexion individuelle que propose le Christ à chaque individu qui le suit

2 Haïr ? Mais encore

« Si quelqu’un vient à moi et s’il ne haït pas son père, sa mère, son épouse, ses enfants, ses frères et ses sœurs et même sa propre vie, il ne peut être mon disciple » dit Jésus, notre Seigneur. En introduction de cette méditation, j’ai posé comme question : Jésus, est-il contre la famille ? Est-il même contre la vie tout simplement ? Est-il contre cette vie qui nous anime et qui nous pousse à nous marier, à nous pacser, à créer une famille, à acheter une maison…à vivre quoi ! Doit-on devenir sœur diaconesse, moine, ermite pour être en adéquation avec la parole de Jésus ? Ce genre de remarques a dû, peut-être, traverser votre esprit. En tout cas, elles ont traversé le mien. Pourquoi Jésus balance-t-il cette parole, Lui qui a dit: « laissez venir à moi les petits enfants », lui qui nous encourage à Aimer notre prochain comme nous-mêmes ainsi que notre ennemie. Lui, qui a accompli la loi de moïse nous disant d’honorer son père et sa mère…Comment concilier ce qui est apparemment inconciliable ? Arrêtons-nous quelques instants sur cette expression « haïr sa propre vie ». En soi, cela est impossible, nous en convenons tous. Nous ne pouvons pas « haïr notre propre vie » et continuer d’exister. En effet, si nous comprenons ce verbe haïr dans le seul registre des sentiments nous allons nous égarer. Il faut donc chercher ailleurs ce que Luc tente de nous communiquer. Cette notion de haïr nous la trouvons aussi dans le livre de la Genèse et dans la lettre aux Romains de l’Apôtre Paul où Dieu déclare « j’ai aimé Jacob et j’ai haï Esaü. » Cette formulation annonce surtout que la promesse de Dieu d’une descendance nombreuse passera par Jacob et non par Esaü. Retenons ici surtout cette idée que cette promesse de Dieu s’inscrit dans le libre choix de Dieu. Donc gardons en mémoire, pour l’instant, que ce verbe haïr n’est pas à comprendre dans le registre des sentiments, mais qu’il est à interpréter dans le registre d’un choix libre et radical de notre part si nous voulons suivre Jésus, notre Seigneur, être ses disciples.

Une histoire de liens

L’évangéliste Luc nous rend donc vigilant sur les liens relationnels que nous avons tissés et que nous tissons encore avec nos parents, par exemple. En nommant l’épouse et les enfants, il nous interroge aussi sur ce qui se vit au sein des couples entre eux et avec leurs enfants. Et enfin en nommant les frères et sœurs, il nous alerte sur les relations que nous tissons avec eux, relations différentes de celles que nous entretenons avec nos parents, avec notre époux ou épouses et nos enfants. Puis Luc nous rend aussi vigilant sur la relation que nous tissons avec nous-mêmes. Enfin Luc, l’air de rien, nous alerte aussi sur cette tendance idolâtre que nous avons lorsque que nous nous approprions des biens et que nous nous attachons à eux d’une manière irrationnelle. Bref, nous sommes des êtres de relations et c’est le charme de notre humanité. Mais en quoi ces liens, ces relations sont-elles haïssables ? En quoi ces liens relationnels nous empêchent-ils de devenir disciples de Jésus Christ ? Telle est la question. Notre Seigneur demande donc à tous ceux qui le suivent de réfléchir à cette notion de liens relationnels qui leurs ont permis d’être ce qu’ils sont. Il leur demande de faire un choix. Non pas de couper tous les liens relationnels qui leurs ont permis d’être ce qu’ils sont. Ce serait de la folie. Mais de choisir maintenant un autre lien relationnel afin que celui-ci devienne premier en tout. Il leur demande de réfléchir à cela. Il leur dit :« soyez relié à ma vie, à mon Amour, à cette Parole Créatrice. Accepter d’être alimenter chaque jour par Elle. Et fort de cette nourriture vivez devant Dieu notre Père, vivez en moi, œuvrez avec moi par l’Esprit Saint pour annoncer la bonne nouvelle. »  Retenons pour l’instant qu’il y a donc un choix à faire : celui de se nourrir de la Parole faite chair en Jésus Christ. Celui de reconnaitre et d’accepter que Le Christ soit venu pour nous réconcilier avec le Père et instaurer en chacun de nous un lien de vie qui devient premier en tout.

Elargissons l’espace de notre tente ! (1)

Ce lien de vie est alimenté chaque jour. En effet, nous connaissons tous le commandement d’amour du Christ Jésus : « Tu aimeras ton Dieu de tout ton cœur de toute ton âme et de toute tes forces et tu aimeras ton prochain comme toi-même.» Ce lien de vie est donc alimenté par ce commandement de notre Seigneur de l’Aimer Lui et notre prochain comme nous même chaque jour. Ce lien de vie qui est l’Amour nous renouvelle dans les profondeurs de notre être lorsque nous prenons tous ensemble la cène. Cet Amour qui s’origine en Lui et qui nous traverse nous guide chaque jour. Et cet Amour-là élargit vraiment l’espace de notre tente. On peut dire, sans prendre trop de risques, que Jésus est une personne qui aime les uns et les autres sans pratiquer un quelconque délit de faciès. Suivre Jésus Christ, devenir son disciple c’est donc faire comme lui. C’est, Aimer comme lui Aime. C’est, s’inscrire dans une même dynamique de vie que la sienne. C’est apprendre à Aimer bien au-delà de la culture familiale, de la classe sociale à laquelle nous appartenons, et aussi de la nation France. L’Amour selon Dieu brise donc toutes sortes de frontières. Ici, ce dont il est question c’est donc de prendre conscience que nous vivons tous dans des enfermements culturels et sociétaux, qui sont bien souvent des murs qui nous cloisonnent, emprisonnent, et nous pousse à juger ceux qui sont emmurés dans d’autres frontières. Retenons pour le moment que la vie du Crucifié/ ressuscité des morts, cette Vie qui nous anime nous encourage à élargir l’espace de notre tente, c’est-à-dire à dépasser toutes sortes de frontières qui nous interdisent de rencontrer telle ou telle personne par ce qu’elle est comme-ci ou comme ça et qu’elle appartient à tel milieu et pas au notre, parce qu’elle parle une autre langue, par ce que sa couleur de peau est différente… Jésus, notre Seigneur, nous demande ici de faire un pas de plus. Ou plutôt un pas de côté.

Un pas de côté !

Ce pas de côté est là pour accueillir une autre Vie que la nôtre, un autre Vie que celle de nos proches. Ce pas de côté est là pour que nous accueillons la Vie du crucifié/ressuscité des morts. Nous savons tous que le Christ Jésus dans l’Evangile selon Jean se décrit comme étant le Chemin, la Vérité et la Vie. Suivre Jésus Christ c’est donc se nourrir, par la seule foi, de la Vie de Celui qui est la Vie. Et lorsque cela a lieu, lorsque cela se réalise cette vie du Crucifié/ ressuscité des morts nous comble, nous traverse, par l’Esprit Saint. Et cette Vie nous offre la capacité de nous ouvrir à cette humanité si diverse, si différentes et pleinement aimé par Dieu notre Père en Jésus Christ. Suivre Jésus Christ c’est donc s’ouvrir à tous les pères, les mères, les époux, les épouses, les enfants, les frères et les sœurs que nous rencontrons et qui nous rencontrent d’où qu’ils viennent et quelques soit leurs classes sociales, leurs étrangetés.

Elargir l’espace de notre tente (2)

Sommes-nous prêts à élargir l’espace de notre tente familiale pour rencontrer celui et celle qui n’est vraiment pas comme nous mais qui, comme nous, reconnaît déjà le même Sauveur et Seigneur, le même libérateur en la personne de Jésus Christ ? Sommes-nous prêts à élargir l’espace de notre tente communautaire et accueillir ceux et celles qui ne nous ressemble pas socialement, culturellement ? Voilà un des enjeux spirituels pour les communautés chrétiennes dans leurs ensembles qu’elles soient catholiques, protestantes, orthodoxes, évangéliques, charismatiques, adventistes, pentecôtistes… De même, sommes-nous prêts à témoigner de Jésus Christ à toute personne étranges, étrangères, lorsque l’occasion se présentera, c’est-à-dire lorsque l’Esprit du Seigneur ouvrira les portes pour que cela se réalise. Sommes-nous prêts à laisser la Vie du crucifié/ ressuscité des morts nous combler et nous traverser pour qu’elle rencontre qui elle doit rencontrer ? Amen.

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